Index Léon Bernard




Jeudi, 11 Avril 1918



Chère Madame,



Votre lettre du 6 m’a fait un réel plaisir; le courrier reprend à peu près sa marche normale, ce n’est pas dommage car un moment cela devenait affolant.

Mon jeune M. vient de me quitter, comme il est élève en pharmacie, il a été désigné comme infirmier; il sera mieux à sa place, je suis content pour lui, car c’est un charmant garçon.

Je suis toujours dans la même région et jusqu’à présent je n’ai pas été inquiété par les voisins d’en face; mais que mijotent-ils! Je ne crois pas qu’ils cherchent quelque succès dans cette contrée; ces jours derniers ils ont rectifié leur front; naturellement avec orchestration; j’ai été privilégié car le tam-tam s’arrêtait juste chez mon voisin; vous voyez que vos prières sont bien écoutées et je ne sais vraiment pas comment vous en témoigner toute ma reconnaissance et vous adresse un grand merci.

Je suis heureux de savoir que les Boches vous laissent un moment de répit, quoique la saison est meilleure, les voyages à la cave en pleine nuit ne doivent pas être très agréables.

C’est vraiment désagréable cet arrêt brutal dans les permissions, quand reprendront-elles? Il faut espérer que cela ne tardera pas. Il faut être patient! C’est très ennuyeux pour Monsieur votre beau frère de ne pas pouvoir se rencontrer avec Mr Pierre, mais vous pouvez encore espérer que sa garnison ne sera pas très éloignée de la capitale et qu’il pourra tout au moins venir en permission de 24 hes, à ce sujet je vous rappelle ma dernière lettre si toutefois Mr Pierre était dirigé sur la région bretonne.

Quant à ma permission, je patiente... c’est un peu obligé, n’est-ce-pas! J’ai le temps d’y rêver sous ma voie de chemin de fer, espérons toujours que cela ne tardera pas car voilà 3 mois que je suis revenu à ma Cie.

Aujourd’hui temps splendide, aussi les avions font de nombreuses excursions, ils attirent sur eux le feu des batteries, pendant ce temps nous avons un peu de répit.

Avant hier matin un boche audacieux est venu à la faveur de la brume nous survoler à moins de 300 mètres – au 4e obus l’avion est en flammes et fait une descente plutôt brutale à 800 m de mon poste; le drame a duré 4 secondes.

...







URL http://bernard.hesnard.free.fr/LeonBernard/Guerre14_18/LettreLB1918_04_11.html