Index Léon Bernard

HAUT COMMISSARIAT
DE LA
REPUBLIQUE FRANCAISE
AUX ETATS-UNIS
1954 COLUMBIA ROAD
TELEPHONE NORTH 8131

WASHINGTON, D.C. 21 Juillet 1918
6-30 matin

No 7 V.O

la précédente no 6 du 16/7 par V.D.




...,

J’attends patiemment l’arrivée du prochain courrier “N” nous ne sommes pas favorisés ce mois-ci comme départs de paquebots; je puis vous dire que le mois prochain nous serons mieux partagés.

Cette fois ... 15 jours sans lettres, il est vrai que le premier mois, nous avons été gâtés.

... mes dernières lettres je les ai adressées à L. et j’espère qu’elles vous sont parvenues.

Depuis le départ du dernier courrier, nous avons eu de bonnes nouvelles du front, tout d’abord, la fameuse offensive. Le poix (??) a été totalement enrayé et en peu de temps cela a du coûter cher aux Boches.

Aussitôt après avoir maintenu la ligne, nous attaquons avec grand succès sur l’aile gauche allant jusqu’à la lisière de Soissons et capturant 20 000 prisonniers et 400 canons, c’est une belle victoire qui doit certainement démoraliser les Boches; espérons que nous pourrons bientôt les chasser de notre pays et avec l’aide des américains, nous arriverons sans doute plus vite que nous ne l’espérions à la victoire.

Aujourd’hui je suis seul, Mr R. et M. N. sont à N.Y. aussi je consacre ma journée du dimanche à faire un peu de correspondance, je regrette beaucoup de ne pas avoir plus de temps et vous adresser un petit journal; ... quand je serai plus entrainé à la langue anglaise, je disposerai d’un peu plus de temps et à ce moment je pourrai vous donner plus souvent de mes nouvelles. De cette façon vous me suivrez mieux dans ma petite existence à Washington.

Je crois vous avoir dit que M.M. N.-R. avaient un appartement l’un dans la 20e Rue, l’autre dans la 22e Rue. De temps en temps il m’arrive de manger avec eux; (quand nous sommes fatigués du Restaurant) et M. R. est le premier cuisinier; il est certainement plus fort que moi sur ce chapître, j’arrive tout de même en second; je vous prie de croire que notre tambouille est excellente, et parfois nous faisons des invitations (des amis de la Mission). Je vous garantis qu’ils voudraient prendre pension chez nous. ... faire la vaisselle, il faut bien que cela se fasse, ce n’est pas une grosse affaire car dans les appartements il y a de l’eau chaude, dans 10 minutes tout est en ordre...

Hier soir j’ai été faire quelques emplettes dans les magasins, j’arrive assez bien à me faire servir: il y a naturellement la question de mesures qui est différente de la nôtre; les vendeurs sont très chics, partout on me dit que si la marchandise ne vous plait pas, vous pourrez toujours revenir l’échanger, pour un Français qu’est-ce-que l’on ne ferait pas!

J’écris aujourd’hui à Mme de St G.. Comme j’ai vu jeudi dernier le Capitaine T., je pourrai toujours lui donner quelques nouvelles et en même temps confirmer ma lettre du 14. dont vous avez du prendre connaissance. Je doit revoir M. T. demain. Si vous pouvez suivre cette affaire, d’après les renseignements que j’ai donnés, la chose est faisable, il pourrait peut être y avoir des intérêts pour moi pour “après-guerre” en plus de ma maison à Nantes. Je pourrai peut-être avoir quelques intérêts dans cette nouvelle combinaison: il est toujours préférable d’avoir deux cordes à son violon!

J’ai reçu avant-hier par la poste et venant de N.Y. le petit sachet pour mettre ma correspondance, ...

...

Dans mes lettres précédentes, je vous disais que j’irai à N.Y. mais je crois que ce service sera réservé à un autre collaborateur demandé en France, j’aime autant cela, car ç’aurait été un peu gros pour moi; j’en ai pour le moment 46 et bientôt 72, ces navires se trouveront bientôt sur la côte américaine, cela me donnera de l’ouvrage et peut être de temps en temps cela me procurera l’occasion ‚aller faire quelques visites; dans cette saison ce n’est pas désagréable. J’ai aussi à suivre une flotte de 40 vapeurs qui est en construction et qui commence à sortir des chantiers pour aller vers la France. Avec tout cela comment voulez- vous que je trouve un instant pour avoir le cafard.

Je vais vous quitter ... pour écrire à ma maman, ainsi qu’à quelques camarades de mon Régiment qui ont été épargnés dans la dernière offensive, ce n’est pas parce que je suis à W. qu’il faut que j’oublie mes compagnons de misère.

...



Je crois qu’aujourd’hui, c’est la journée la plus chaude que j’ai eue depuis mon arrivée. Je vous écris de mon bureau et le ventilateur tourne.

Je vois que les Boches continuent toujours leurs raids sur Paris et la grosse Bertha fait des siennes, je suis plus tranquille de vous savoir au T.

URL http://bernard.hesnard.free.fr/LeonBernard/Guerre14_18/Tardieu1918_07_21.html