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Je comptais ce soir être pris avec mes papiers et ne pas pouvoir rencontrer Mr R. à qui je dois confier ma lettre pour profiter de la valise qui part demain, car je vais à Baltimore et je rentrerais bien tard.

Comme je vous le disais dans ma lettre du 24, j’attendais hier deux Capitaines de mes voiliers de Baltimore, ils étaient exacts à leur rendez-vous. J’ai passé une agréable journée et je leur ai fait visiter les beautés de mon Washington, ils sont repartis émerveillés. Ils ne pensaient pas que W. était si bien; demain je déjeune avec eux à bord de la „Seine“, c’est un grand 4/mats, très joli navire. (Ne lisez pas je déjeune au bord de la Seine; hélas!!)

Mon travail à W. est toujours très chargé, et il n’est pas prêt d’être à jour, avec tous mes voyages à Norfolk et Baltimore, je ne sais pas quand il viendra du personnel, cela ne ferait pas de mal pour soulager tout notre service. J’attends encore de jour en jour un 4/mats à Norfolk et un 3/m à Baltimore et 1 à New York; je préfère ce dernier, car il me fera changer un peu de quartier.

Je ne vous raconte pas mon existence en vous envoyant un petit journal tous les jours; 1° le temps me manque et 2° ce serait de grandes répétitions, car ma vie est toujours à peu près identique ici, à part mes expéditions pour l’armement des navires.

La chaleur qui semblait s’atténuer reprend un peu mais pas aussi fort que la 1ère quinzaine d’août, maintenant on peut se dispenser de costume blanc.

Ce pays est assez curieux, une vague de chaleur qui dure 1 mois ½ environ, et par contre l’hiver est très rigoureux de Décembre à mi-Mars il y a continuellement glace et neige, ..., tous les appartements ont le chauffage central.

Quand vous recevrez cette lettre, vous ne serez pas loin de quitter le T. car elle doit vous parvenir le 10 ou 11 Sept. Comme je compte 10 ou 12 jours d’écart avec le prochain paquebot, le courrier suivant je l’adresserai R. B.

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Je fais toujours quelques combinaisons et je pense que si par hasard vous n’aviez pas pu entreprendre votre voyage du T. à Nantes, vous pourriez toujours le faire de Paris, en voyageant de jour vous ne risquez absolument rien, du moins à mon avis; quitte à prendre un billet de 1ère cl. vous serez sûre de ne pas rencontrer les poilus français ou yankees; pour ma part j’ai voyagé assez souvent entre Nantes et Paris et je puis vous dire que je n’ai jamais été dérangé par les poilus; je n’ai pas besoin de vous dire de vous rallier aux sages conseils de vos chers parents.

Je crois vous avoir dit que j’avais reçu une gentille lettre ...; je commence à avoir pas mal de retard dans ma correspondance, et avant peu je serai débordé, je consacrerai 1 ou 2 dimanches pour mettre mon petit courrier à jour;

en attendant je vous demanderais de faire patienter votre chère famille et dites-lui que je ne l’oublie pas, étant le premier malheureux de ne pas pouvoir vous donner plus souvent de mes nouvelles; ...

Je ne sais pas si je vous ai dit que j’avais reçu une carte de Melle F., envoyée de Ste Anne d’Auray, je vois avec grand plaisir que quoique bien loin personne ne m’oublie dans mon exil.

Vous devez penser comme moi, 3 mois aujourd’hui, cela fait le ¼, encore autant et l’on descendra l’échelle; à moins que les Boches veuillent nous faire une surprise en devançant cette date; j’accepterais volontiers; ...

Mr. N. rentre jeudi, cela va alléger le travail de Mr R., car tous les deux ils ne peuvent guère compter beaucoup sur moi, ayant déjà ma bonne part.

... il ne faut pas que je rentre trop tard, car je prends le train de bonne heure demain matin pour Baltimore.

Avec toutes ces tournées, ma Miss Scott ne m’a pas beaucoup vu la semaine dernière, qu’est-ce-que je vais prendre!! Heureusement que je n’ai pas peur.

Excusez pour le papier à lettres, je ne suis pas chez moi, et j’ai utilisé ce qui me restait dans mon portefeuille.

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La dernière lettre je l’ai fermée au galop, et n’ai pas eu le temps de la relire, je réclame toute votre indulgence.

Mon petit doigt m’a dit que vous faisiez un concours avec M.e pour savoir laquelle de vous deux recevrait le plus de correspondance de leur cher futur; je suis navré, car je me doute bien que vous ne décrocheret pas la timbale; si c’est la balance que vous prenez à témoins, j’écrirai sur du papier assez fort.

* „E“ = navire Espagne