Brouillon de lettre: Céline Bernard à son fils Paul – non daté (Octobre 1942 ??)
Mon Paul,
Tu t’imagines combien nous avons été heureux de recevoir tes télégrammes. Nous savons par
Mr. Blanchin que tu es dans le lake district. Nous avons cherché
ce coin – et nous l’avons trouvé à 80 km de la frontière Ecossaise.
Hélas! tu es encore trop loin de nous, puisque depuis la lettre du 17 Juin,
nous n’avons pas eu de détails sur ta vie de prisonnier.
Nous savons toutefois, à notre grand soulagement, que tu es assez confortablement logé et bien
nourri et que tu as par les correspondants de
ton Papa quelques secours d’argent. C’est beaucoup, mais ce n’est pas tout et nous
espérons que l’oisiveté et l’éloignement de tout ce qui te tient au
coeur, ne te donnent pas trop le cafard. Evidemment, comme
tes camarades de captivité, tu prends ton mal en patience, attendant la
libération qui vous sera peut-être accordée.
Pour nous, le temps nous semble très long de ne pas te voir et s’il y avait la télévision tu
nous verrais souvent attendris devant ta photo de Marseille. Pourtant nous
remerçions le Ciel qui a voulu te garder ta vie si peu avancée et déjà si pleine
d’évènements. Comme dit ton Pépère,
pour un coureur d’aventures, Paul est servi.
A présent, ton devoir de soldat est de rester patient, toujours obéissant à tes chefs
– et tu dois bien en avoir avec toi – prisonniers comme toi hélas.
Votre aumônier aussi peut-être est-il des vôtres!!!
A Nantes – à Paris, nous supportons une vie
qui est jugulée mais nous sommes confiants et fermes et nous
saurons attendre cette délivrance qui peut-être ne saurait tarder.
Les santés se maintiennent. Pourtant il y a de braves amis manquants à l’appel – comme l’ami
Poidevin et cette brave Madame Allée partie au mois d’août
après une maladie cardiaque de plusieurs mois.. Ta Tante
Juliette se maintient – elle a assez bonne mine et vit dans l’espoir de revoir son
Paul.
Mère Jeanne est à la clinique, opérée cette semaine d’une cataracte du seul oeil
valide. Elle devenait en effet aveugle.
Ton Papa travaille beaucoup quand il va à
Marseille – voyages fatigants que je verrai finir avec plaisir.
Denise s’occupe et fonce pour se consoler de ce
qui se passe et de ton éloignement – dans les études ardues du piano même voir
de grandes orgues.
Tous les amis pensent à toi – en particulier les Nantais et les
amies Angle. Elles ont passé l’été avec nous – les pauvres ayant été très malades après
le dur hiver parisien.
Pépère et
Mémère étaient venus se refaire à la
Fraternité pendant 17 jours.
Quant à Paulette, elle est nommée
institutrice à Nanterre. Son frère
est dans les frigos à Toulon. A regret il a abandonné la
marine – sa femme nichée au Tréport – lui donnant de grandes inquiétudes avec les
bombardements.
Lucien et
René Laridan sont toujours prisonniers. Henri marié a
eu le chagrin de perdre son petit garçon âgé de 4 mois.
Allons – mon Paul – voici une vague revue de la famille et des amis. Ton
copain Gaston a fini ses licences de
mécanique et de chimie et travaille avec son Père. Ton placide camarade vibre quand même lorsqu’il
entend parler de toi et est venu plusieurs fois demander de tes nouvelles.
Mme Pertigau…
Version : 16.06.2005 - Contents : Martine Bernard-Hesnard
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